
“Se donner à voir, la personne au-delà de la maladie de peau”
Guillaume OLIVER, photographe indépendant, nous invite au travers de «Portraits de peaux » à nous interroger à la fois sur notre rapport intime à la peau comme au regard que nous posons sur celles et ceux affectés par les maladies cutanées.
Cette exposition itinérante à travers la France a pour vocation de sensibiliser le grand public au fardeau d’une maladie de peau dans la vie des patients.
Alexandra
« La maladie sur le visage a fait que tout le monde a vu que j’étais mal
dans ma peau au sens propre, et qu’elle me faisait souffrir…
Il y a un côté « perdu » où l’on ne sait plus quoi faire pour paraître normale,
ou pour que ça ne se voie pas… La maladie m’a permis de me reconnaître fragile
et d’être obligée de m’accepter fragile. »
Andrine
« Des fois, je me disais « Ce n’est pas moi en face! » ...
Mais il y avait la douleur donc forcément on le sait vite…
Malgré tout, je pense que ce n’est pas possible de se faire manger
10 ou 20 ans de sa vie juste à cause de ça…
Puis il y a le déclic de se dire : « C’est à toi de contrôler ton corps et pas l’inverse » ...
Et le cerveau aussi car le cerveau joue beaucoup. Tu ne dois pas subir la maladie. »
Tiffany
« Cette peau sèche, rugueuse, marquée, rougie par les plaques,
je la considère comme une croix, c’est le baromètre de mon humeur…
On est dans une société où le paraître est très important,
et dès qu’il y a un petit truc différent, ça va attirer l’attention.
Quand on a de l’eczéma, on ne se regarde pas dans la glace, on évite son propre regard. »
Marie-France
« Maman a mis 10 filles au monde. Moi je suis la 3ème et sur les 10,
l’aînée, la 3ème et la dernière ont fait de l’eczéma.
Et je pense que le premier regard à la naissance,
notamment de ma mère mais aussi de mes parents,
ce premier regard de déception voire de rejet a pu induire l’eczéma pour moi …
Pour moi, c’est la plus grande souffrance, l’exclusion, le rejet. Et ma peau elle montre ça. »
Brahim
« Personnellement je suis bien dans ma tête, je suis comme je suis.
Après, le regard des autres je m’en fiche complètement.
Je passe devant eux, ça leur plaît ou ça leur plaît pas…
Moi je suis bien, je ne cherche pas à plaire à quelqu’un. »
Camilia
« Quand maman est inquiète, je dis « mais ça va et tout, mais je ne peux rien faire »…
L‘eczéma, j’aimerais bien ne plus en avoir, et que les copains ne le voient pas.
Des fois ils se moquent, surtout au centre aéré… ils me disent « t’es pas belle ».
Mais mes copines, elles ne m’ont jamais dit ça. »
Sa maman : « Sa peau est fragile mais cela ne l’empêche pas d’être belle.
C’est juste une peau dont elle devra prendre soin toute sa vie. »
Karine
« Dans mon enfance et mon adolescence, j’ai dû subir les moqueries…
on vous montre du doigt, les gens se demandent ce que vous avez…
Finalement ça m’a permis de me forger le caractère, de répondre aux gens
et de mieux accepter l’eczéma que j’avais sur la figure.
Il faut arriver à l’accepter, à vivre avec et c’est dur. »
Solen
« Les douleurs étaient devenues vraiment insupportables, à en pleurer tous les jours,
se gratter jusqu’au sang, avoir des croûtes partout, s’ébouillanter sous la douche…
Un jour j’ai décidé de ne plus passer la moitié de mes journées à être shootée par des médicaments,
j’ai arrêté les traitements et j’ai trouvé la natation comme échappatoire…
Pendant 5 ans, je suis allée à la piscine tous les jours pendant une heure pour me soulager des douleurs. »
Cécile
« L’eczéma fait partie de ma vie depuis toujours. Il fait partie de moi,
je me gratte en permanence, je suis identifiée par mes gestes de grattage.
Je n’avais pas l’impression d’être malade, j’étais « allergique »,
j’étais « eczémateuse », on ne m’avait jamais expliqué que j’avais une maladie.
Je me soignais avec beaucoup de mépris et un petit peu de cortisone et ça ne marchait pas très bien. »
Marjolaine
« C’est une maladie qui s’affiche donc tout le monde voit que vous êtes malade…
on se sent vulnérable au regard de l’autre, on se sent poreux …
Moi j’étais extrêmement myope, et ça m’aidait beaucoup! Surtout quand j’arrivais devant un miroir.
J’enlevais mes lunettes et du coup je me voyais floue. Voilà... mon regard,
c’était « je ne voulais pas me voir »… c’était ça mon regard. »
Lorine
« Des fois ça me gêne mais sinon pas souvent… je le vis bien mais moyen.
Aux gens qui ont de l’eczéma, je leur dirais qu’il ne faut pas changer sa vie juste pour ça,
qu’il faut la vivre comme elle est, même avec la maladie. »
Sa maman : « L’eczéma, je le vois comme un cinquième membre de la famille,
qui est indésirable chez nous mais qu’on emmène partout. »
Retrouvez les fondements du projet du photographe, Guillaume OLIVER, sur son site.